Accueil Le Trône de Fer / A Song of Ice and Fire La traduction de Game of Thrones est-elle si mauvaise ?

La traduction de Game of Thrones est-elle si mauvaise ?

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Pour certains, la traduction française de Game of Thrones (ou plus exactement de A song of Ice and Fire) est ratée. Pour d’autres, elle est très réussie. On reproche au traducteur, Jean Sola, de ne pas avoir respecté le style (simple et direct) de George R.R Martin en donnant au récit un ton archaïsant et soutenu, contraire à l’esprit de l’auteur. Alors que la saga est devenue une œuvre incontournable, lue par des millions de lecteurs francophones, la qualité de la traduction a fait l’objet d’un débat passionné parmi les fans.

Dans le camp des « pour », on souligne la très bonne traduction des noms propres (même si un peu discutable pour certains), un style qui a enjolivé le texte original, l’ancrant davantage dans un registre moyenâgeux et soutenu. 

Dans le camp des « contre », on fustige la traduction des termes direwolf et kraken par exemple et plus généralement l’emploi d’un registre soutenu, qui ne colle pas forcément à l’esprit du livre et au style de l’auteur.

Pour ma part, j’ai lu les deux premiers tomes de la saga en français avant de basculer en anglais. Il est vrai qu’on est étonné par le changement : phrases plus courtes, syntaxe simple…

Tableau des traductions des lieux :

Tableau lieux

Tableau des traductions de certains termes et noms propres :

Tableau noms communs et propres

Pour juger l’écart de la traduction je me suis amusé à comparer des passages du tome 1, A Game of Thrones, entre l’original et la traduction. Je me suis concentré sur deux citations parmi les plus emblématiques.

« The things I do for love »

« Ce que me fait faire l’amour, quand même ! »

Cette phrase est prononcée par Jaime peu avant qu’il ne précipite dans le vide Bran. On pourrait la traduire littéralement par « Les choses que je fais par amour » mais évidemment, ça ne « sonne » pas très bien. « Ce que me fait faire l’amour» est une excellente traduction, elle restitue parfaitement le sens de la phrase. Mais pourquoi ajouter le « quand même ! » ? Cela correspond peu à la psychologie de Jaime et surtout, cela ne colle pas très bien à la situation. Pourquoi ne pas avoir traduit simplement par « ce que l’amour me fait faire » ou même par « voici ce que me fait faire l’amour » ?

« I did warn you not to trust me, you know. »

« Ce n’est pourtant pas faute de vous avoir prévenu [...] qu’il ne fallait pas vous fier à moi »

Ce sont les paroles que prononce Littlefinger à Ned Stark au moment de le trahir. Le traducteur « sur-traduit » cette phrase. En anglais, lorsque la base verbale est précédée par l’auxiliaire (que l’on omet à la forme affirmative), cela signifie que l’on met le verbe en emphase. Cependant, la tournure choisie par le traducteur est excessivement emphatique : « Ce n’est pourtant pas faute ». Surtout, le « you know » n’est pas traduit. Le traducteur a sans doute été gêné par le niveau de langage courant voire familier du « you know », qu’il ne pouvait pas traduire en ayant choisi une tournure si soutenu et emphatique avec : « Ce n’est pourtant pas faute… ». Mais pourquoi ne pas avoir opté pour une traduction simple, comme : « Je vous avais pourtant bien dit, qu’il ne fallait pas me faire confiance, voyons » ? Peut-être que Jean Sola voulait accentuer la trahison de Littlefinger…

Jaime Lannister

Ainsi, la traduction de Jean Sola n’est pas mauvaise ni même erronée mais le traducteur a choisi un parti pris risqué, à savoir enjoliver et densifier le texte original, ce qui peut heurter le lecteur. Il ne faut cependant pas oublier que le premier tome est paru en 1996 (plus de quinze ans !) et que la notoriété de la saga était à cette époque très faible, d’où une plus grande liberté laissée au traducteur. De toute manière, aucune traduction n’est parfaite puisqu’il est impossible de restituer toutes les nuances d’une langue étrangère. Aucune langue n’est identique ou équivalente à une autre et comme le dit le proverbe italien : « traduttore, traditore ». 

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17 Commentaires

  1. jaclyn

    29 avril 2014 à 8 h 20 min

    bel article, j’ai apprécié!

    Dernière publication sur Pas de nouvelles bonnes nouvelles : Le sac

    Répondre

  2. Morgane

    2 mai 2014 à 22 h 24 min

    Personnellement, j’ai lu les quatre premiers bouquins en français puis je suis passée à l’anglais quand ADWD est sorti. J’ai beaucoup aimé la traduction française de Sola, au point d’être un peu « déçue » quand je suis passé à l’original. Ce n’est pas que le style de Martin soit mauvais, ses phrases sont vraiment percutantes et bien tournées, mais Sola donne plus de vie à l’univers médiéval de Westeros, à mon avis, c’était un plaisir de lire sa traduction. Après je comprends tout à fait ceux qui n’aiment pas et pensent qu’il a « trahi » l’œuvre originale, moi je pense juste qu’il l’a améliorée.

    C’est vrai que « Ce que me fait faire l’amour, quand même ! », c’était pas le mieux quand même…

    A noter que Jean Sola ne s’occupe plus de la traduction de la saga depuis ADWD. Je ne sais pas du tout ce que vaut le nouveau traducteur.

    Répondre

    • thibaultdelavaud

      3 mai 2014 à 22 h 31 min

      Merci de partager votre avis. Je pense que Sola a voulu enrichir la traduction pour mieux coller à l’univers et sans doute, « attirer » les lecteurs. En soi cela ne me gêne pas mais je regrette que sur certains passages clés, il ait continué de « sur traduire » alors que Martin voulait précisément des phrases lapidaires et marquantes. Je ne sais pas non plus ce que vaut la nouvelle traduction mais c’est une tâche difficile, surtout compte tenu le parti pris par Sola.

      Répondre

  3. AriSeldon

    31 mai 2014 à 0 h 16 min

    Bonsoir,
    Je partage les remarques sur les exemples que vous citez, mais Je suis bien moins indulgent .
    Je viens juste de lire le prologue et le premier chapitre du tome 1. Et pour moi c’est consternant.

    Lourdeur et uniformité dans le style :
    « Tout grelottant, Will étreignit plus étroitement son perchoir et, plaquant sa joue contre l’écorce, en savourait le doux contact gluant quand, émergeant de la lisière ténébreuse, parut une ombre, juste en face de Royce »

    « Or comme, mains soudain molles et paupières closes sur une prière, Will laissait tomber les morceaux d’épée, de longs doigts élégants lui frôlèrent la joue puis s’attachèrent à sa gorge »

    Un vulgaire braquemart, bien moche, à la poignée décolorée par la sueur, à la pointe émoussée pour avoir trop servi, mais qu’il jaillît seulement du fourreau, et le ser nobliau, sa peau… pas un liard

    Choix des mots et images douteux :
    « …des tripotées de factions… »;
    « …à la vaste pelisse de zibeline des palpitations quasi animales . »;
    « …un regard où flambait le meurtre ».
    « …Tu gâtouilles… »;
    « …de rochers sournois à point pour faire trébucher »;
    « …froufrouter les feuilles… »
    « … les épées se croiser, de subir chaque fois leur bizarre couinement d’angoisse »
    « la lune poursuivait sa lente reptation. »

    Traduction mot à mot :
    Dismount est traduit démonter au lieu de descendre de che… ou mettre pieds à terre.
    « The twilight deepened » devient « le crépuscule se creusait », déclinait aurait été plus correct.

    Contre sens:
    « Ser Waymar may have felt the cold that came with them, but he never saw them, never heard them. …. Behind him, to right, to left, all around him, the watchers stood patient, faceless, silent,the shifting patterns of their delicate armor making them all but invisible in the wood »
    Sola traduit l’opposé.
    « Dans son dos, à sa droite comme à sa gauche, formant cercle autour de lui, les spectateurs patientaient, muets, sans visage et pourtant tout sauf invisibles, en dépit de leur parfaite immobilité, car ils avaient beau ne se mêler de rien, le chatoiement perpétuel de leur précieuse armure empêchait de les confondre avec la forêt »

    Ce n’est qu’une liste non exhaustive de griefs valables pour le Prologue.
    Je n’ose imaginer la suite.

    Répondre

    • thibaultdelavaud

      31 mai 2014 à 11 h 07 min

      Bonjour,

      merci pour votre commentaire très intéressant et votre précieuse contribution au débat. Effectivement, la traduction du prologue laisse pantois. J’espère (peut-être suis-je naïf) qu’il s’agit une fois encore d’un parti pris très osé (et risqué) de Sola et non pas d’erreurs. Je demeure en tout cas très dubitatif sur la valeur ajoutée de la traduction par rapport au texte original. Cela pose également plusieurs questions : est-ce que la traduction a été relue et revue par un tiers avant d’être publiée ? Si non, est-ce toujours le cas pour n’importe quel livre ? Ou alors est-ce que l’éditeur français a accepté ce parti pris ? Pourquoi ce traducteur a-t-il été choisi et pas un autre ? Questions dont j’aimerais connaître la réponse…

      En tout cas, si cela peut convaincre les lecteurs de lire le texte en version originale !

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  4. Lancelot

    7 août 2014 à 23 h 02 min

    Pour revenir sur certains exemples de AriSeldon :

    « …un regard où flambait le meurtre »
    « … les épées se croiser, de subir chaque fois leur bizarre couinement d’angoisse »
    « la lune poursuivait sa lente reptation»

    Personnellement, je trouve ces tournures très réussies ! (surtout la dernière)

    En revanche, ayant lu le tome 1 et ayant été difficilement accroché par le style, il est nécessaire de passer les 50 premières pages pour voir une nette amélioration.

    Pour moi, ce qui pêche totalement dans la traduction française, c’est de ne pas avoir fourni la liste des personnages par maison. J’ai du imprimer celle que j’ai trouvé sur le net pour pouvoir suivre correctement l’histoire.

    Répondre

  5. MOREAU

    15 mars 2015 à 16 h 02 min

    Je trouve moi aussi lamentable la traduction , rien ne m’énerve plus que de lire démonter au lieu de mettre pieds à terre quand à SER mot inventé pourquoi ne pas avoir utilisé sire.
    le traducteur aurait du relire les traductions de Tolkien ou de relire le roman de renard de renard pour s’imprégner du style moyen-ageux.

    Répondre

  6. Titoune

    14 avril 2015 à 15 h 31 min

    Je suis également très vite passée à la version originale après avoir lu les 2 premiers volumes en français
    Il y avait vraiment des tournures de phrase que je trouvais trop « alambiquées »
    Bien sur, j’ai également fait la comparaison et certaines me laissent quand même assez perplexe, me font beaucoup rire aussi

    Mes préférées sont celles-ci :

    Version Originale :
    There were times, not many but a few, when Jon Snow was glad he was a bastard.

    Traduction :
    Ainsi qu’il lui advenait parfois à l’improviste, mais de loin en loin, le sentiment de sa bâtardise enchanta soudain Jon Snow.

    Version Originale :
    - Who built that ? Some king ?
    - No. Just the men who used to live here
    - What happened to them ?
    - They died or went away

    Traduction:
    - Qui c’est qu’a construit ça, que c’est tout en pierre ? Un roi ?
    - Non. Simplement les hommes qui vivaient là.
    - Et il leur est arrivé quoi, qu’y en a plus ?
    - De mourir ou de s’en aller.

    Euuuuuh pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué finalement ?

    Me suis demandée si ces traductions à rallonge n’étaient pas faites pour justifier le découpage français en 4 volumes finalement…

    Répondre

  7. Jean-Paul Deshayes

    27 décembre 2015 à 19 h 22 min

    Oui, en effet, des allongements injustifiés / verbiage dans les traductions citées plus haut.

    Suggestions: « The things I do for love »

    Traduction : « Que ne ferais-je pas par amour ! »

     » I did warn you not to trust me, you know. »

    Traduction :
    « Je vous avais pourtant bien prévenu de ne pas me faire confiance,  »

    Jean-Paul Deshayes

    Répondre

  8. Banana

    30 décembre 2015 à 19 h 23 min

    Pour les traductions de lieux, notez quand même que :
    - « Peyre » signifie « Pierre » en occitan ; on le retrouve par exemple dans pas mal de nom de villages, mais aussi dans des toponymes comme « Col de Peyresourde »… Donc « Peyredragon » pour « DragonStone » me paraît plutôt futé, en fait.
    - de même, »Aigues » signifie bien « eaux » en occitan – Aiguesvives existe d’ailleurs, c’est un bled en Ariège. Ça me paraît donc une excellente traduction de « Riverrun ».

    Répondre

  9. Romain

    6 janvier 2016 à 20 h 23 min

    La chute de ton article est superbe.

    Répondre

    • thibaultdelavaud

      10 janvier 2016 à 18 h 08 min

      Une pensée pour Mlle Cuny ;)

      Répondre

  10. Remi

    9 août 2018 à 15 h 12 min

    A un moment grosse erreur dans le tome 1. Le traducteur confond la Néra et la Ruffurque v.o Red Fork c’est là ou se trouve gué-cabot.

    Répondre

  11. Dañon

    14 janvier 2019 à 9 h 41 min

    Le peu que j ai entraperçu de cette saga avec dialogues ineptes ne m a aucunement convaincu de regarder ces images sombres avec des costumes ridicules et des décors fumeux .pouah

    Répondre

  12. Kévin Messager

    14 mars 2019 à 22 h 42 min

    Monsieur Sola veut se la jouer très soutenu, mais il en fait trop et « sola » nuit souvent à la compréhension, alors que parfois il ne maîtrise même pas le français rudimentaire.
    J’ai relevé plusieurs « malgré que  »
    Et ça, bah ça m’ecorche . On ne se prend pas pour Proust, avec des phrases à rallonge et 8 virgules, que je dois relire 2 ou trois fois pour comprendre(ou pas ), alors qu’on est capable de si grossière erreurs !!

    Répondre

  13. Keron

    24 mai 2019 à 12 h 47 min

    Je me suis attaqué à la lecture de ces livres en français. J’aime lire et écrire. J’ai même une passion pour l’écriture et le choix des mots justes. Dès les premières pages j’ai été stoppé dans ma lecture à plusieurs reprises face à des tournures ou des choix de mots. Pas que ces mots soient mauvais mais il y a comme un choix systématique de compliquer les phrases ou de trouver des mots qui n’apportent rien et sont peu usités.
    Exemple dans les premières pages :
    « The morning had dawned clear and cold, with a crispness that hinted at the end of summer. »

    Traduit de manière pompeuse en :
    « Dès l’aube, alors qu’ils se mettaient en route pour assister à l’exécution, un petit froid limpide et sec leur avait dénoncé la fin prochaine de l’été. »

    Dans l’exemple cité, nous avons plus l’habitude de dénoncer une personne ou une chose comme responsable de quelque chose. Je comprends le choix du traducteur d’avoir voulu appuyer sur l’importance de l’hiver qui est un thème central de la saga. Mais la phrase retenue me rappelle mes années de pigiste où j »étais payé au caractère et ajoutais des mots ou adjectifs inutiles. Ici, pas besoin d’ajouter le qualificatif « petit » devant froid. Le verbe dénoncer est mal choisi. Il pose un problème de lecture de la phrase car le lecteur va naturellement chercher à associer le verbe à un personnage avant de comprendre le sens réel de la phrase. C’est à chaque fois un temps d’arrêt en ce qui me concerne tant les phrases ne sont pas limpides en lecture. Cela demande beaucoup de concentration par moment au lieu d’entrer dans l’histoire et dans la poésie évoquée par les images peintes par l’auteur. Si je prends du Zola, tout est clair et limpide.

     » Il leva une dernière fois les yeux, il regarda les Halles. Elles flambaient dans le soleil. Un grand rayon entrait par le bout de la rue couverte, au fond, trouant la masse des pavillons d’un portique de lumière. »

    Le lecteur se projette bien avec ce texte et la scène se dévoile immédiatement.
    Ce n’est pas le cas avec le style de Solas.
    Sa phrase aurait pu gagner en lisibilité :
    « Le jour s’était levé clair mais un froid sec trahissait la fin de l’été. »
    Le verbe trahir est tout aussi fort que le verbe dénoncer. Mais il est plus adapté ici. Pour Martin ce n’est pas le froid qui est limpide (cela ne veut rien dire) mais le jour ou plutôt le ciel. Pour rappeler le thème du premier chapitre il aurait pu parler d’un froid qui aiguillonne ou mordait mais ce serait alors changer l’intention de l’auteur. Nous restons ici dans l’image très lisible pour le lecteur. C’est un ciel clair. Il y a un froid sec. Nous sentons que l’hiver arrive. Si je devais traduire ce texte, je me serais contenté de cette traduction qui est le reflet de ce que voulait dire Martin. Pas besoin d’ajouter de grands mots ou de faire trop d’effets. Martin n’est pas Zola.

    Répondre

  14. Vincent

    11 novembre 2019 à 11 h 35 min

    C’est très subjectif mais je trouve la narration tellement ringard: cahin caha, clopin clopant. peu ou prou etc. sont utilisé excessivement

    Répondre

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